L’Afrique, un continent riche en ressources naturelles et culturelles, est malheureusement devenu un dépotoir pour les déchets des pays occidentaux. D’Antananarivo à Dakar, en passant par Nairobi ou Conakry, les capitales africaines sont souillées par d’immenses décharges à ciel ouvert où les déchets plastiques se comptent par milliers de tonnes, dégageant des odeurs pestilentielles, des fumées et particules toxiques. Cet article explore comment et pourquoi l’Afrique est devenue la destination finale pour une grande partie des déchets électroniques, plastiques et toxiques produits par les pays développés.

La genèse du problème

Avec l’essor de la technologie et de la consommation de masse dans les pays occidentaux, la production de déchets a explosé. Face aux coûts élevés et aux réglementations strictes concernant la gestion des déchets dans leurs propres pays, de nombreuses entreprises occidentales ont trouvé une solution économique : exporter leurs déchets vers l’Afrique. La pauvreté, les failles dans les régulations internationales et la corruption locale facilitent cette pratique.

Les déchets électroniques : un problème croissant

L’un des exemples les plus flagrants de cette exploitation est le déversement de déchets électroniques, souvent appelés e-déchets. Selon un rapport de l’ONU, en 2019, le monde a produit environ 53,6 millions de tonnes de déchets électroniques, dont seulement 17,4 % ont été recyclés de manière adéquate. Une grande partie des 82,6 % restants finit en Afrique, notamment au Ghana, au Nigeria et en Côte d’Ivoire.

  • Le cas du Ghana

Le Ghana abrite l’un des plus grands dépotoirs de déchets électroniques du monde : Agbogbloshie, à Accra. Des milliers de tonnes de déchets électroniques provenant des États-Unis, d’Europe et d’Asie aboutissent chaque année dans ce bidonville. Les conditions de traitement des déchets y sont rudimentaires et dangereuses. Les travailleurs, souvent des enfants, brûlent des câbles pour récupérer le cuivre, inhalant des vapeurs toxiques qui causent des maladies respiratoires et des intoxications sévères.

Les déchets plastiques : une menace pour l’environnement

Les déchets plastiques constituent un autre défi majeur. En 2018, la Chine a interdit l’importation de la plupart des plastiques destinés au recyclage, ce qui a poussé de nombreux pays occidentaux à se tourner vers l’Afrique pour se débarrasser de leurs déchets plastiques. Des pays comme le Sénégal et le Kenya ont vu une augmentation significative des importations de plastiques, souvent sous le couvert de donations ou de matériaux recyclables.

  • Le cas du Kenya

Au Kenya, malgré des lois strictes interdisant l’importation de déchets plastiques, les ports de Mombasa et de Nairobi reçoivent encore des conteneurs remplis de plastiques usagés. Ces déchets s’accumulent dans les décharges, les rivières et les océans, menaçant les écosystèmes marins et terrestres. Les micro plastiques contaminent les sols agricoles, perturbant la chaîne alimentaire et posant des risques pour la santé humaine.

Déchets industriel toxiques : un danger mortel

En plus des déchets électroniques et plastiques, les déchets toxiques industriels sont également exportés vers l’Afrique. Ces déchets contiennent souvent des substances dangereuses comme le plomb, le mercure et l’amiante, qui peuvent causer des maladies graves et des dommages environnementaux à long terme.

  • Le cas de la Côte d’Ivoire

En 2006, le scandale du Probo Koala révèle l’ampleur du problème. Ce navire, affrété par une compagnie pétrolière néerlandaise, a déversé des tonnes de déchets toxiques à Abidjan, en Côte d’Ivoire. Les substances toxiques ont causé la mort de 17 personnes et des problèmes de santé pour des dizaines de milliers d’autres. Cet incident a mis en lumière les lacunes des régulations internationales et la vulnérabilité des pays africains face à l’importation de déchets dangereux.

Vers une solution : les efforts locaux et internationaux.

Pour résoudre ce problème, plusieurs pays africains ont renforcé leurs législations sur l’importation des déchets. Par exemple, le Rwanda a interdit tous les sacs plastiques en 2008, et le Kenya a suivi en 2017 en imposant une interdiction stricte des sacs plastiques à usage unique.

Au niveau international, la Convention de Bâle, un traité visant à réduire les mouvements de déchets dangereux entre les pays, a été amendée pour inclure une interdiction plus stricte sur les exportations de déchets électroniques. 

La Convention de Bamako, entrée en vigueur le 22 avril 1998, adoptée sous l’égide de l’Organisation de l’unité africaine, interdit l’importation en Afrique de déchets dangereux et radioactifs en provenance de Parties non contractantes. Elle soumet les mouvements au sein du continent africain à un système proche des procédures de la convention de Bâle 

La convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants est un accord international visant à interdire certains produits polluants. La convention a été signée le 22 mai 2001 dans la ville éponyme. Elle est entrée en vigueur le 17 mai 2004. Elle compte 186 membres et 152 pays ont signé. Cependant, l’application de ces réglementations reste un défi majeur.

Il est impératif que la communauté internationale prenne des mesures plus rigoureuses pour prévenir l’exportation illégale de déchets vers l’Afrique. Les régulations existantes, telles que les conventions de Bâle et de Bamako, doivent être strictement appliquées et renforcées. Parallèlement, les pays africains doivent être soutenus dans le développement d’infrastructures efficaces pour la gestion des déchets, tout en sensibilisant leurs populations aux dangers des déchets importés. La coopération internationale et l’engagement à respecter l’environnement et la santé publique sont essentiels pour mettre fin à cette exploitation et garantir un avenir durable pour le continent africain.

Auteur: Luc GNONLONSA

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